Le ventre des femmes est précieux !

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Cet article est lu en 5 minutes, le temps de prendre une tisane et une belle respiration.

Je suis peu enclin aux polémiques. Je sais trop combien la passion est mauvaise conseillère, surtout chez moi. Pourtant, il y a des choses qui me révoltent tellement que je ne peux rester muet, surtout lorsqu’il s’agit du ventre des femmes. Il n’est pas question ici de débat ou de réflexion, d’astuce ou de solution. Il s’agit d’une évidence que nous ne devrions plus oublier. Quand finira-t-on par comprendre que  :

Le ventre des femmes est précieux !

Le ventre jugé coupable : à chaque âge son lot…

Adolescentes, les jeunes femmes qui souffrent de leurs règles se voient prescrire une pilule contraceptive pour que se taise leur utérus, contraint et tiraillé. Ce n’est qu’un tout petit comprimé, sa taille n’est-elle pas bien pensée ? Très faiblement dosée. Seulement de quoi étouffer les douloureux murmures d’un abdomen un peu trop bavard. Quelques semaines ou mois avant, nous avions pris le soin d’offrir un bâillon en calmant ses contractions, un anti-spasmodique suffisait pour qu’il n’y paraisse rien.

« C’est normal, c’est ton corps qui grandit », oui son corps grandit et des tensions dans son corps et dans son esprit émergent, c’est le lot de toute métamorphose. Vous savez la chenille, la papillon, tout ça, tout ça. Ce n’est pas une partie de plaisir.

Pourtant cela ne réclame pas d’être tu !

Cela réclame du silence. Celui de l’accompagnant présent et sensible qui saura écouter les doutes et prendra le temps non pas t’éteindre, mais de soulager ce feu qui jaillit en elle.

Femme venant de donner la vie, alors qu’elle se trouve entre ciel et terre, soulagée et épuisée, on n’hésite pas à aller chercher manu militari ces placentas qui sont trop longtemps lovés dans le giron de la jeune mère. Pas plus de 20 minutes pour une expulsion, c’est le protocole ! Pourquoi 20, et pas 40 ou 60… c’est qu’il y a du monde qui attend.

Bien souvent, les soignants sont, avec la meilleure des volontés, prisonniers et pressés par le temps. Ce temps dont la femme a tant besoin pour rencontrer son enfant. Et trouver du repos.

Trop de ventre, il suffit de s’en débarrasser

Le précieux ventre
Le précieux ventre

« Perdez votre ventre », les gros titres qui fleurissent dès le mois d’avril ne peuvent être plus explicites. Votre ventre est en trop et se doit de disparaître !

Plus tard, si ce n’est déjà fait plus tôt, le couperet tombe. Votre flore intestinale, et ses affreux alentours, est la source de tous vos maux. Il est temps de la nettoyer, de purifier votre ventre des immondices qu’il recèle.

Sus au candidose, soyez propres mesdames !

Quelle que soit l’attention que vous portez à votre alimentation ou à votre hygiène de vie, il faudra récurer. À l’image des écuries d’Augias (un des travaux de notre brave Hercule), sauf qu’ici, aucun Héros ne vient vous proposer de solution pérenne.

Femme mûre, on inquiète, on effraie, votre ventre est, en silence, le lit de tant de cancers.

La mort derrière votre nombril !

Alors il faut supprimer. Il est temps d’en finir. Le petit couteau fera son office. Un utérus ne sert à rien lorsque les enfants ne sont plus attendus. Les ovaires sont source de tant de désagréments. Nous avons une solution, la solution pour qu’enfin vous puissiez dormir tranquille. Regardez dans votre famille, d’autres femmes l’ont vécu (à quel prix ?) et aujourd’hui ne vont pas si mal que ça…

Si seulement…

Notre corps est le fruit de milliers, de millions d’années d’évolution. Un nombre tellement grand que les esprits les plus élevés d’entre nous arrivent à peine à le concevoir. Il n’est pas bien fait, il est parfait.

A tous les moments de la vie, le vente des femmes cachent un trésor
A tous les moments de la vie, le vente des femmes cachent un trésor

Chaque organe, chaque cellule a un rôle précis, une place unique, un intérêt spécifique. Qui tout au long de la vie est sans ambiguïté. Si d’aventure, il n’est plus utile, il régressera pour n’occuper que la place congrue et suffisante. Tant que la vie coule en lui c’est qu’il a une fonction, un rôle à jouer déterminant, voire indispensable, à l’équilibre du tout, de notre corps.

Je n’accuse pas la médecine contemporaine. Et ce fut un réel succès pour Eugène Koeberlé de réussir la première hystérectomie (ablation de l’utérus) en 1862, ou encore la synthèse de la première molécule contraceptive par Luis Miramontes, chimiste mexicain, en 1951. Bien des fois, le scalpel fut salvateur et le contraceptif efficace.

Je n’accuse pas, non plus, les médecines alternatives, naturopathie en tête qui a aussi son lot de succès, et dont les cures soulagent tellement.

Aujourd’hui, je m’interroge sur cet impérieux besoin que nous avons tous à chercher des raccourcis ! Si notre médecine peut être efficace et sauver des vies dans des cas extrêmes, est-il pertinent d’utiliser les mêmes armes dans des situations si éloignées ?

Si les médecines dites naturelles peuvent trouver des solutions non invasives et raisonnables, pourquoi parlent-elles, sans cesse, de nettoyer, supprimer que ce soient des bactéries ou des mémoires ? L’une ou l’autre font d’une femme ce qu’elle est aujourd’hui, son histoire, sa personne.

Un autre regard

La définition de l’efficience, selon Wikipédia, est « l’optimisation de la consommation des ressources utilisées dans la production d’un résultat ». Dit autrement : cueillir une fleur avec deux doigts est efficace et efficient, avec un bulldozer, est efficace, mais pas du tout efficient !

Aujourd’hui, notre médecine manque cruellement d’efficience et prône l’efficacité pour justifier son manque de délicatesse. Au final, le corps des femmes est meurtri et beaucoup d’entre elles se convainquent, à leur corps défendant, que les symptômes qui cherchent à les guider vers une plus grande harmonie, sont les ersatz d’erreurs de la nature.

De même, la médecine naturelle trahit d’anciennes pensées où l’Autre est toujours l’ennemi, en utilisant un vocabulaire guerrier et tout en voulant garder un regard global sur la personne, elle oublie le fil de son histoire.

Quelles que soient nos convictions en termes de soin ou de santé, que nous soyons un homme ou une femme, nous ne pouvons espérer un monde meilleur sans redonner aux ventres des femmes la place qu’ils n’auraient jamais du quitter.

Et pourtant, de simples gestes peuvent suffire à vous réapproprier ce lieu précieux. Et pour vos enfants ensuite, cherchez aussi l’efficience en tenant compte de qui ils sont pour prendre soin de toute la famille au mieux.

Pour continuer cette réflexion, je vous invite vivement :

  • À visiter le très touchant site participatif https://le-corps-des-femmes.com/ où les nombreux témoignages vous prennent aux tripes, quelle que soit votre histoire, vous sortez des ces lectures avec un je-ne-sais-quoi qui vous fait voir le monde différemment.
  • À consulter l’interview de Vanessa Mangavel sur l’épuisement maternel et toutes les réalités qui se cache derrière ces mots.

Cet article a 8 commentaires

  1. Garin p

    Tout à fait d’accord, nous les femmes avons beaucoup de soucis de santé mais peu de véritables solutions.

    1. Loïc PLISSON

      Il me semble qu’il existe des solutions qui sont malheureusement rarement proposée en première intention.
      Le solutions proposées sont souvent radicales, ou du moins disproportionnées. On utilise de traitements lourds de conséquences pour des problèmes qui devraient être géré avec finesse.

  2. Alexandra

    Bonjour,
    C’est un très bel article, vraiment très bien écrit. Je suis assez partagé à la fin de ma lecture.
    Je suis d’accord avec toi et ton image de « la médecine bulldozer » ; trop souvent, la médecine classique se contente d’observer et de chercher à corriger un organe « malade » sans se préoccuper de la raison de la défaillance et bien souvent, on ne fait que masquer ou détourner le problème pour un temps.
    Néanmoins, on ne peut pas aborder le problème des règles douloureuses et celui d’une hystérectomie pour cause cancer de la même manière.
    Il existe effectivement des solutions à tester en micronutrition, aromathérapie, pour calmer les syndromes prémenstruels, et souvent, si on aborde le problème du point de vue de la micronutrition par exemple, on découvre des déséquilibres qu’il est bon de corriger. Malheureusement, les solutions sont souvent un peu onéreuses et il faut être patient pour obtenir des résultats ; or, notre société ne prend pas toujours le temps d’être à l’écoute et les professionnels de santé ne sont pas forcément bien formé sur cette approche.

    Pour ce qui est d’un cancer en revanche, ovaire, col de l’utérus ou autre, on est généralement dans une question de vie ou de mort et je pense que le risque d’attendre ou de ne pas vouloir être trop invasif est extrêmement compliqué à prendre de même que la position du corps médical est difficile : il est facile de critiquer une approche trop radicale ou de critiquer trop de prudence. Nous sommes dans un monde procédurier qui est prêt à lyncher le 1èr qui commet une erreur, sans se préoccuper de la raison qui a pu motiver la prise de décision initiale. De ce fait, les décisions prises sont à mon avis biaisées (et bien entendu, c’est le patient qui en subit les conséquences parfois désastreuses)

    Je pense qu’il n’y a pas de bonnes solutions ; la difficulté, quand on parle de la santé, du bien-être ou de la vie de quelqu’un, c’est que rien n’est blanc ou noir, le système n’est pas binaire et du coup, il est difficilement reproductible. Nous avons tous un ressenti, une perception de la douleur, du bonheur, très différence et très intime.

    Bref, j’arrête mon roman. Merci pour ce bel article en tout cas, qui ouvre un débat sans fin…

  3. Helene

    Merci pour cet article…. Comme beaucoup de femmes je fais une fixation sur mon ventre, prendre soin de mes intestins…je vais pousser plus loin la lecture car j ai beaucoup d interrogations.

  4. MELISSANDE

    Un article très intéressant, je suis d’accord avec ces questionnements mais je suis un peu frustrée après avoir pointé du doigt des systèmes qui ne fonctionnent pas de ne pas avoir de véritables solutions proposées à la fin ? Je n’attends pas de solutions miracles mais des alternatives, des pistes à essayer…

  5. Anne T

    Bonjour Loïc et bonjour à tous ,
    Hier sur France Inter dans l’émission « grand bien vous fasse » était abordé la notion de NUANCE qui semble manquer actuellement dans notre société .Je vous recommande vivement de l’écouter .Il me semble que cela pourra aussi étayer notre réflexion sur ce sujet de manière générale et dans notre manière d’aborder notre santé .
    je vous souhaite une bonne journée à tous

  6. Camille

    Bonjour,
    Tout à fait d’accord avec Alexandra. J’ajouterai qu’il y a une chose qui m’embête dans l’article, c’est le côté radical et succinct sur les femmes qui viennent d’accoucher et dont « on va chercher le placenta » et c’est tout.
    En effet il y a des protocoles. En Belgique je ne sais pas, mais en France on commence à agir au bout de 30 min. La question du pourquoi c’est parce qu’on sait qu’au bout de 30 min le risque d’hémorragie augmente. N’oublions pas que l’hémorragie est la 1ère cause de mortalité maternelle…
    On ne commence pas par « aller chercher le placenta »; c’est la dernière action que l’on fait avant le massage, vider la vessie ou mettre l’enfant au sein par exemple… « Aller chercher le placenta » est la dernière action que l’on fait quand rien n’y fait.
    Nous savons que ce risque est augmenté pour des accouchements long, quand le bébé est gros ou quand il y a un antécédent de césarienne, entre autre. Il y a la balance bénéfice/risque toujours en question en médecine.
    Il faut peut être arrêter de croire que les soignants font des gestes purement par malveillance comme il a été beaucoup dit vis à vis de l’épisiotomie qui ne se pratique quasi plus aujourd’hui… En tant que sage-femme en 10 ans de carrière je n’ai fait que 2 épisiotomie avec réticences et j’ai malheureusement du « aller chercher le placenta » 4 fois et ces patientes saignaient énormément.
    Nous savons également qu’après 30 min d’attente le pourcentage de placenta qui se délivre seul diminu et que même si dans ce contexte la femme ne saigne pas, le risque d’infection augmente alors. Tout ça pour dire que pour certains sujets il faut prendre énormément de recul.
    Il est vrai que les problèmes purement féminins ne sont pas beaucoup documentés du fait que nous vivons dans une société patriarcale et que la médecine était gouvernée par les hommes il n’y a pas si longtemps que ça mais les choses évoluent. Peut être pas assez vite mais elles évoluent. L’obstétrique est précurseur car les sages-femmes introduisent de plus en plus l’homéopathie, l’ostéopathie, l’aromathérapie et bien d’autres médecines dans leurs pratiques…
    Il y a certainement un problème dans le « je règle les problèmes avec un simple comprimé » c’est une vision à court terme et non à long terme, je suis d’accord. Mais n’est-ce pas un problème sociétal ?
    Le problème du ventre de la femme reflète un problème bien plus grand qu’un problème médical, il est très probablement démonstratif d’un mal sociétal…
    Comme Alexandra je pourrais en dire encore beaucoup mais je m’arrête là… A vos réflexions…

  7. Eugénie

    Bonjour Loïc, un très grand merci pour avoir pris le temps d’écrire sur un sujet qui est pour moi aussi sensible que douloureux. J’ai vécu les trois expériences que vous évoquez: pilule, régime amaigrissant et purification tous azimuts. Votre propos, et sans doute parce que vous le tenez en qualité d’homme, est un soulagement, une ouverture possible vers une vraie rencontre avec celui que, l’avez-vous remarqué? je n’ai pas encore réussi à nommer: mon ventre. Je voulais vous faire part d’un ressenti lorsque vous parlez d’efficience. Les mots pour le définir, « optimisation de la consommation », « production de résultats », me semblent dangereux. J’aime à penser que les choses du corps ne rentrent pas dans une logique d’efficience. Peut-être gagnerions-nous à faire l’effort de ne pas utiliser ces termes, à rester les doigts suspendus au-dessus du clavier, un long moment s’il le faut; à goûter ce que cela nous fait de pas savoir comment dire. Cette incertitude, ce « je ne sais pas » de la pensée m’apparaît aujourd’hui comme une humble et belle étape vers une autre relation à nos corps. Je serai heureuse d’avoir votre avis à ce sujet. Et merci encore pour le soin que vous prenez de nous – nous tous et tout de nous.

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